
Droits des afro-américains
L’ÉVOLUTION DU SYSTÈME JUDICIAIRE AMÉRICAIN
FACE AU RACISME
Par Charles Bisaillon
Abstract
Introduction
Le développement historique des relations interraciales
La guerre de Sécession et son impact sur le racisme
Le 20e siècle
La Constitution, instigatrice au racisme
Procès marquants de l’Histoire des États-Unis
Plessy vs. Ferguson, 1892
Procès des agresseurs de Rodney King
Le cas Trayvon Martin
Abstract
In the following article, I’ll present the evolution of the American Law system according to the relationship between the Afro-Americans and Americans. The main factors to considerate are their common History, the Constitution all Americans respect and some of the main cases which were milestones in the development of the Law and the culmination towards the acquisition of the Civil Rights for all Afro-Americans. I shall conclude by underlining the fact that America has improved the Law system, but is still prone to inequalities because of the system’s flaws and the social perception of Black vs. White relations.
Introduction
«I have a dream that my four little children will one day live in a nation where they will not be judged by the color of their skin but by the content of their character»
Depuis des siècles, la race blanche a toujours été associée à des images de dominance et de supériorité. Cette association découle du fait que la plupart des grands empires de l’Histoire de l’humanité furent constitués de Blancs, tout comme les bassins de foisonnement intellectuels et industriels étaient surtout Ouest-Européens, territoires très homogènes sur le plan racial. Mais qu’en est-il de nos jours? Afin d’analyser le parcours des rapports interraciaux au fil des ans, il est légitime d’évaluer le cas des États-Unis et l’évolution du Droit en conséquence des évènements marquants qui ont saisi ce bassin de l’Occident contemporain. À mon avis, il est possible d’affirmer qu’il y ait eu une amélioration du Droit américain, mais celui-ci est encore fortement biaisé par le passé. La formulation d’une réelle égalité judiciaire est empêchée par trois éléments principaux, soit l’Histoire des États-Unis qui démontre une évolution parsemée de haine et stéréotypes, la Constitution, dont les Premier et Quatrième amendements encouragent encore le racisme légal et finalement, certains procès marquants qui démontrent la faiblesse relative de la jurisprudence américaine, face aux relations entre les Blancs et les Noirs étasuniens.
Le développement historique des relations interraciales
Premièrement, afin de comprendre l’essence du racisme dans la culture américaine, il est impératif de remonter jusqu’aux rapports qu’ont développé les colons anglais avec les Africains, à partir des débuts de l’histoire coloniale des États-Unis. La pertinence de ce retour dans l’Histoire réside dans le fait que le Droit américain est profondément influencé par la tradition qui s’est bâtie au fil des siècles entre les Américains et les Afro-Américains, un héritage qui est reflété dans leur jurisprudence. Il est donc primordial de cibler des événements marquants qui ont contribué à créer un Droit inégal sur le plan racial. En effet, la situation initiale des premières colonies américaines n’était point reluisante sur le plan de la main d’œuvre, ce qui désavantageait grandement la métropole britannique. C’est pourquoi on décida d’avoir recours à des esclaves noirs en provenance d’Afrique, considérés comme une solution rentable et efficace. Cependant, il faut clarifier un aspect particulier de cette situation, c’est-à-dire le statut de cette main d’œuvre noire à son arrivée. Tous les arrivants qui étaient en situation économique précaire ou ayant besoin d’argent étaient employés en tant que «travailleurs sous contrat», plus connus sous l’expression d’«indentured servants». Ce concept permettait aux propriétaires d’engager des hommes sous un contrat stipulant qu’il s’engageait à payer le transport de la terre natale jusqu’au lieu de travail ainsi que de leur accorder une portion de leur territoire à la fin du contrat. C’est donc dire qu’il n’y avait pas encore d’inégalité légitime à cette époque dans les rapports entre Noirs et Blancs dans les Treize Colonies. Cependant, ce concept de «travailleurs sous contrat» fut le précurseur des tensions interraciales dans le système de justice colonial. En effet, le cas de John Punch, datant de 1640, est souvent identifié comme étant le premier Africain infligé d’une sentence d’esclavage à vie dans ce qui deviendrait éventuellement les États-Unis d’Amérique. Cet évènement prend toute son importance dans les circonstances de la sentence de Punch, car l’acte commis, bien que répréhensible, n’a pas entraîné une punition égale pour tous. En effet, l’Africain s’est enfui vers la colonie de Maryland, fuyant son contrat qui le liait à un agriculteur de la colonie de Virginie nommé Hugh Gwyn. Or, il ne fuit pas seul, mais bien avec deux autres travailleurs, lesquels étaient toutefois de race blanche. Bien qu’ils furent tous trois éventuellement attrapés, John Punch se fit imposer une sanction à vie, soit une vie de servitude en tant qu’esclave légal, tandis que les hommes blancs s’en sortirent avec une pénalité beaucoup moins grave, pour le même crime . C’est à partir de ce moment qu’on remarqua les limites du Droit britannique, étant donné que le «Common Law» britannique, en vigueur dans les Treize Colonies, ne protégeait que les citoyens reliés à la Grande-Bretagne par la naissance. C’est par cet incident que s’établit le premier clivage notable entre les ethnies en future terre américaine. Une loi en vigueur en 1662 en Virginie illustre la situation dans laquelle l’acceptation légale du racisme a mené les Treize Colonies. Cette loi stipule: « Whereas the only law in force for the punishment of refractory servants resisting their master, mistress, or overseer cannot be inflicted upon Negroes, nor the obstinacy of many of them be suppressed by other than violent means, be it enacted and declared by this Grand Assembly if any slave resists his master (or other by his master's order correcting him) and by the extremity of the correction should chance to die, that his death shall not be accounted a felony, but the master (or that other person appointed by the master to punish him) be acquitted from molestation, since it cannot be presumed that premeditated malice (which alone makes murder a felony) should induce any man to destroy his own estate.» À la lecture de cette loi, l’on comprend l’ampleur que la tolérance du racisme envers les Noirs a prise suite à des événements tels que le cas de John Punch. Mais ce n’est que quelques décennies plus tard que l’inégalité raciale s’établit définitivement. En effet, ce rapport de force houleux prit une tournure désolante en 1724, avec l’adoption du Code Noir français en Louisiane, qui définit officiellement le statut légal des esclaves noirs, qui furent définis tels qu’étant des «biens meubles» , ainsi qu’inaptes à détenir le droit de posséder ou encore de contracter. Bien que le contexte interracial fût encore relativement vague lors de l’arrivée de travailleurs africains au début des Treize Colonies, l’adoption de cette législation a concrétisé la supériorité blanche, constituant une excuse légale au racisme.
La guerre de Sécession et son impact sur le racisme
L’un des plus grands événements historiques des États-Unis demeure la guerre de la Sécession. Cet affrontement interne marqua non seulement les relations entre les Américains, mais aussi la perception sociale des Noirs et leur rôle dans la société. Effectivement, cette guerre se conclut par l’abolition de l’esclavage aux États-Unis, ce qui fut un changement majeur pour les Afro-Américains, considérant les lois racistes et accablantes pour les conditions de vie des descendants africains. Toutefois, cela ne veut pas dire pour autant qu’il y eut automatiquement des relations favorables entre les deux ethnies principales des États-Unis. Les Américains de race blanche continuèrent à tenir leur supériorité pour acquise, malgré les liens qui ont pu être tissés au cours de la «Civil War». En effet, malgré l’adoption de lois afin de sensibiliser peu à peu les Américains envers les Afro-Américains, l’imaginaire collectif demeura empreint de racisme. C’est cette réalité que dénote le docteur Dexter B.Wakefield, enseignant à l’université d’Illinois en communications, dans son article «Racism in America : A Thing of the Past?». «The Civil War put an end to the system of slavery in America, but oppression, unequal treatment and lack of opportunity persisted through the enforcement of segregation and "Jim Crow" laws. » . C’est ce qu’illustra le cas d’Homer Plessy, évoqué ici-bas, quelques décennies plus tard, démontrant que la ségrégation était une réalité concrète et assumée par les Blancs, qui n’y voyaient encore qu’une vérité indéniable.
Le 20e siècle
Cependant, le 20e siècle fut révélateur pour les Afro-Américains, qui se rassemblèrent et condamnèrent collectivement l’ostracisation dont ils étaient victimes. C’est finalement par le biais de révolutionnaires tels que Malcolm X, Martin Luther King, Rosa Parks, le mouvement des Black Panthers mené par Huey Newton, et autres que l’ensemble des Afro-Américains dénoncèrent l’injustice sociale omniprésente. Cette dernière n’en fut toutefois pas toujours une. En effet, au début du 20e siècle, la législation qui régulait les autobus, dans des villes telles que Montgomery, en Alabama, qualifiait de ségrégation la différence entre les espaces du devant de l’autobus et le fond, attribués respectivement aux Blancs et Noirs. Ces derniers ne pouvaient s’asseoir dans une zone appartenant à l’ethnie opposée, ce qui provoqua l’ire de certains Blancs qui, étant forcés à rester debout et voyant des sièges inoccupés dans la zone «Noire», décidèrent de contester la loi à leur faveur. C’est à partir de ce moment que les Afro-Américains furent obligés de se résigner à céder leurs sièges, ce qui fut légalisé par une interprétation questionnable du Quatorzième Amendement par les juges mis en charge du procès, ignorant le principe accordé par cet Amendement qui attribuait un statut d’égalité à tous . Or, cette décision fut révoquée le jour où Rosa Parks refuser de quitter son siège, engrangeant une lutte sans merci pour une réelle équivalence judiciaire. Les droits civils obtenus chèrement au travers de ces révolutions ont fini par concéder aux Américains de race noire le statut de citoyen égal à tout autre citoyen américain. Toutefois, tel qu’il le sera démontré au cours des paragraphes suivants, ce statut de citoyen est perçu tel qu’une façade par plusieurs, puisque les Afro-Américains sont encore tout aussi sujets à des répressions et victimes de racisme de nos jours.
En conclusion, la riche histoire des esclaves africains et de leurs descendants illustre un rapport de force qui n’a jamais été réellement égal et qui, malgré l’évolution des relations entre Noirs et Blancs, jusqu’à l’élection du premier Président noir des États-Unis en 2008, dépeint la réalité de la mentalité américaine, qui ne semble, quoique plus censurée, pas nécessairement moins raciste, étant donné qu’il s’agisse d’un sujet tabou. L’évolution historique des rapports raciaux aux États-Unis fut marquée par la naissance du document de jurisprudence le plus important de l’histoire du pays, soit la Constitution, qui demeure encore de nos jours une source de controverse tel qu’il le sera expliqué ici-bas. Somme toute, à la suite de ces évènements marquants, encore de nos jours, il relève de la fiction de pouvoir imaginer combien de racistes expriment réellement tout haut ce que plusieurs pensent tout bas, mais force est d’admettre que ce nombre sera toujours plus élevé que ce qui serait souhaitable.
La Constitution, instigatrice au racisme
Ensuite, la Constitution est l’une des raisons principales pour lesquelles le racisme est encore permis et protégé par la loi américaine. Mais qu’est-ce que la Constitution? Il s’agit du document de jurisprudence le plus important des États-Unis, étant donné qu’il est composé des lois implacables qui régissent les rapports entre les Américains. Elle fut rédigée par les Pères fondateurs des États-Unis et fut approuvée le 17 septembre 1787, entrant en vigueur le 4 mars 1789, date depuis laquelle elle a été soumise à des modifications au travers de 27 amendements . Malgré ces correctifs, la Constitution n’est pas appropriée aux besoins des États-Unis en matière de Droit, car elle correspond à une vision dépassée de la réalité américaine, surtout en ce qui a trait aux interactions interraciales. Effectivement, en considérant les évènements marquants évoqués ci-haut, il est possible de dénoter que la Constitution n’est pas une panacée et elle retient les Américains dans le développement d’une ouverture d’esprit quant à leur culture, étant donné que les Pères fondateurs étaient dotés d’une vision empreinte de préjugés tels que la suprématie blanche et l’homogénéité sociale, concepts contraires à la population américaine contemporaine. La Constitution américaine est dotée de faiblesses flagrantes, mais il s’agit d’enjeux fragiles, car ils sont aussi intimement liés à l’identité américaine. Effectivement, le Premier Amendement souligne particulièrement la primordialité de la liberté d’expression. «Congress shall make no law respecting an establishment of religion, or prohibiting the free exercise thereof; or abridging the freedom of speech, or of the press; or the right of the people peaceably to assemble, and to petition the Government for a redress of grievances. » Ce qu’il faut retenir de cette citation, c’est la complexité du débat qu’entraîne un tel amendement. Effectivement, il transcende le débat portant sur la liberté, c’est-à-dire la frontière à partir de laquelle la liberté d’un individu est brimée par celle de son prochain. Voilà où toute la légitimité de la remise en question de l’égalité raciale dans le Droit américain prend sa forme, c’est-à-dire dans le questionnement que ce débat entraîne. Peut-on réellement affirmer que cette jurisprudence a évolué en faveur des Afro-Américains s’ils peuvent encore être victime de racisme, au nom de la liberté d’expression? De plus, il ne s’agit pas du seul amendement qui soit répréhensible, car le Quatrième Amendement encourage une sorte de racisme plus concrète. Conséquemment, le profilage racial est omniprésent aux États-Unis et complètement permis par cet amendement, lui qui cite: «The right of the people to be secure in their persons, houses, papers, and effects, against unreasonable searches and seizures, shall not be violated, and no Warrants shall issue, but upon probable cause, supported by Oath or affirmation, and particularly describing the place to be searched, and the persons or things to be seized» . Or, cette citation démontre clairement la liberté remise entre les mains des agents de police, puisqu’il en revient à leur jugement et leurs valeurs de décider des critères auxquels les «criminels» doivent correspondre avant d’être ciblés. Considérant les relations houleuses établies au cours de l’Histoire des États-Unis entre les Américains et les Afro-Américains, ainsi que d’autres ethnies, l’on pourrait remettre en cause la pertinence d’un amendement aussi permissif lorsque l’on analyse la réalité américaine de nos jours. Cependant, la Constitution contient tout de même des amendements avantageux pour les multiples ethnies que l’on peut retrouver aux États-Unis, surtout lorsque l’on surligne le Quinzième Amendement, qui supporte la cause des anciens esclaves et des victimes de racisme, puisqu’il soutient que le droit de vote ne pourra être compromis par la race ou le passé de servitude. Ironiquement, cet amendement tonifie tout de même la faiblesse relative de la Constitution, puisque le droit de vote fut attribué aux Noirs en 1965, car plusieurs États demandaient aux Afro-Américains désireux de s’impliquer dans la vie politique de passer par un test de connaissances ardu et leurs imposaient des frais supplémentaires, deux critères contraignants pour la situation de vie de la plupart des descendants africains de l’époque. Cela démontre donc que la Constitution peut être contournée et entraîner un Droit raciste, ce qui ne devrait pas être accepté dans un pays où le quart des habitants provient de divers milieux culturels. Bref, je pense que la Constitution, bien qu’elle coïncide avec la tradition américaine, ne correspond plus à la réalité des États-Unis, malgré qu’il s’agisse d’un pays qui prône une mentalité de «melting-pot». Le fait que la Constitution, écrite par des hommes aux idéaux de suprématie blanche et habitués à la réalité de la servitude des Noirs, soit encore éligible de nos jours relève d’une barrière qui empêche les Américains de réellement se débarrasser des tabous culturels liés à la culture Afro-Américaine et prouver que la société n’est plus, ou du moins plus aussi, raciste qu’à l’époque des Pères fondateurs. À défaut de suggérer son entière abolition, il faut prendre en considération la nécessité d’une actualisation des principes et valeurs véhiculés au sein de ce document législatif, puisqu’il permet encore trop d’injustices légales, triste oxymore qui est transcendée au sein de trois principaux procès des derniers siècles aux États-Unis.
Procès marquants de l’Histoire des États-Unis
Plessy vs. Ferguson, 1892
Ce procès est emblématique par ses circonstances et l’impact légal qu’il a eu par la suite. Effectivement, le verdict final entraîna l’une des notions les plus importantes pour la gestion des rapports entre Noirs et Blancs. L’accusé, monsieur Homer Plessy, était d’origine Africaine, mais selon une proportion de 1/8. Il était tout de même considéré comme étant Afro-Américain et Noir à part entière selon la loi en vigueur en Louisiane. C’est pourquoi lorsque monsieur Plessy décida de prendre le train de la compagnie d’«East Louisiana Railroad» et s’assit dans un wagon identifié comme étant un wagon «Blanc», il fut arrêté et envoyé en prison, avec une amende à payer étant donné qu’il avait consciemment ignoré le «Separate Car Act». Toutefois, Homer Plessy décida de s’opposer à cette punition et la mena en cour, auprès du juge John Howard Ferguson, un avocat du Massachussetts, connu pour avoir identifié le «Separate Car Act» comme étant anticonstitutionnel auprès des trains qui voyageaient dans plusieurs États. Plessy défendit sa cause en plaidant la violation des amendements 13 et 14 de la Constitution, c’est-à-dire :
« Amendment 13 : Neither slavery nor involuntary servitude, except as a punishment for crime whereof the party shall have been duly convicted, shall exist within the United States, or any place subject to their jurisdiction.
Amendment 14: All persons born or naturalized in the United States, and subject to the jurisdiction thereof, are citizens of the United States and of the State wherein they reside. No State shall make or enforce any law which shall abridge the privileges or immunities of citizens of the United States; nor shall any State deprive any person of life, liberty, or property, without due process of law; nor deny to any person within its jurisdiction the equal protection of the laws. »
Cependant, le juge Ferguson décida qu’il était complètement légitime que l’État de Louisiane régisse le fonctionnement et la répartition dans les trains qui voyageaient seulement à l’intérieur de la Louisiane. Homer Plessy plaida donc coupable pour avoir refusé de changer de wagon malgré qu’il ait été dans la faute. Le plaintif décida de reporter la sentence en appel auprès de la Cour Suprême de Louisiane, qui décida de maintenir la décision du juge Ferguson . Parmi les 8 membres du tribunal, un seul d’entre eux, John Harlan approuva Homer Plessy dans sa requête, tel que le démontre ses propos tenus à la suite du procès : « Our Constitution is color-blind, and neither knows nor tolerates classes among citizens. In respect of civil rights, all citizens are equal before the law...In my opinion, the judgment this day rendered will, in time, prove to be quite as pernicious as the decision made by this tribunal in the Dred Scott case. The present decision, it may well be apprehended, will not only stimulate aggressions, more or less brutal and irritating, upon the admitted rights of colored citizens, but will encourage the belief that it is possible, by means of state enactments, to defeat the beneficient purposes which the people of the United States had in view when they adopted the recent amendments of the Constitution. » Tel que l’évoque clairement John Harlan, cette décision appuie la croyance selon laquelle, peu importe les progrès apparents en matière de justice, il est possible de détourner certaines lois afin de parvenir à ses fins dans le système américain. (La mention du cas Dred Scott, tenu en 1857, fait référence au procès qui se conclut par la déclaration que les Africains détenus en tant qu’esclaves et leurs descendants n’étaient pas des citoyens américains, donc n’étaient pas protégés par la Constitution. Cette décision fut corrigée par le Quatorzième Amendement de la Constitution, qui définit les descendants africains et descendants d’esclaves comme étant également protégés par la justice américaine. ) Ce constat est encore d’actualité, tel que le démontrera un autre procès marquant dans l’Histoire. Finalement, le procès de Homer Plessy se conclut par le maintien de l’amende, que le plaintif finit par payer. Un adage juridique américain primordial découla du verdict final de ce procès, puisque ce dernier permis de comprendre que les Blancs et les Noirs des États-Unis étaient des êtres séparés, mais égaux aux yeux de la loi.
Procès des agresseurs de Rodney King
Ce procès est particulièrement symbolique au travers de l’amélioration progressive, quoique brusquée, de la justice par rapport aux droits des Afro-Américains. En effet, cet événement troubla profondément les communautés noires des États-Unis, notamment par la capture sur caméra-vidéo de l’altercation entre Rodney King et les policiers. Cette confrontation découla du fait que King, revenant d’une soirée arrosée avec des amis, conduisait au volant de sa voiture, accompagné de ses acolytes. Son taux d’alcoolémie sanguine correspondait au double de la limite permise en Californie. C’est pourquoi, lorsqu’il fut aperçu par des agents de police, il tenta de s’enfuir en dépassant largement les limites de vitesse. Malgré les avertissements répétés des policiers, Rodney King refusa de se rendre. La poursuite atteint un point tel que plusieurs voitures de police pourchassaient maintenant King, ainsi qu’un hélicoptère. Il finit par être intercepté, mais ne se rendit pas si facilement pour autant. Les policiers demandèrent aux passagers de la voiture ainsi qu’au conducteur de descendre avec les mains en l’air, afin de mener une procédure de mise en arrestation. Cependant, King, visiblement intoxiqué par diverses drogues, agit de façon erratique, ce qui mena les policiers à engager une attitude plus agressive, jusqu’à finalement employer un fusil «Taser». C’est alors que George Holliday, un résident dont la demeure était située aux alentours de la scène, commença à filmer. Ce qui se déroula par la suite marqua l’imaginaire collectif américain. En effet, étant donné les réactions trop prononcées de King au goût des agents, il fut victime de 56 coups de bâton consécutifs ainsi que de nombreux coups de pied. Une telle brutalité laissa Rodney King dans un pitoyable état, avec une fracture osseuse faciale, une fracture de la cheville ainsi que plusieurs différentes blessures et lacérations . Malgré son comportement récalcitrant, King ne méritait clairement pas ce traitement indigne d’agents de police. Malheureusement, le premier procès ne put traiter de la situation de façon appropriée, marqué notamment par un changement de juge et un jury constitué de 10 Blancs, un Latino-Américain et un Asiatique. Dans un cas pareil, où la race était considérée comme étant un facteur important, il est possible de douter de la pertinence de la constitution du jury. Le verdict final acquitta trois des quatre officiers de police accusés et le jury ne put s’entendre sur la sentence du dernier, malgré la preuve irrévocable qu’apportait la vidéo. C’est pourquoi Los Angeles fut le théâtre d’émeutes massives, caractérisées par une communauté noire outrée par le manque de volonté du système judiciaire d’instaurer une réelle égalité. Le Département de Justice des États-Unis rouvrit le procès à la suite des émeutes, plaidant un viol des droits civils fondamentaux de la part des quatre officiers. On tenta d’y établir des versions des faits plus claires et éviter de ne prêter attention qu’à la vidéo. De plus, Rodney King témoigna contre les officiers afin de relater des évènements tels qu’il les remémorait . Ce nouveau procès se solda par la condamnation de deux officiers à 32 mois de prison, tout en acquittant les deux autres agents . Le cas de King est houleux, étant donné qu’il est difficile de juger la réaction des policiers face à son comportement, c’est-à-dire l’excès de vitesse, le refus de coopérer et le fait qu’il était intoxiqué. Toutefois, le traitement qui lui fut réservé est inacceptable et bien qu’il puisse s’agir d’une coïncidence, ce fut un Afro-Américain qui subit la brutalité policière et dans un contexte tel que celui des États-Unis à la fin du XXe siècle, les policiers ont fait preuve, soit de négligence extrême, ou de racisme indéniable en traitant Rodney King de la sorte. Leur condamnation a toutefois représenté une amélioration notable de l’égalité judiciaire entre les ethnies, malgré le faux-pas initial du procès de Los Angeles. Bref, le cas de Rodney King a transcendé les relations tendues développées au cours du 20e siècle entre Américains et Afro-Américains.
Le cas Trayvon Martin
Ce procès matérialise et englobe tous les éléments développés au cours des dernières pages. Il n’est pas encore terminé, mais les circonstances de la mort de Trayvon Martin ont ravivé de nombreux débats au sein des États-Unis. La soirée du 26 février 2012, George Zimmerman, l’accusé, se promenait au volant de sa voiture dans son quartier, lui qui tenait le rôle de surveillant de quartier. Remarquant le jeune Trayvon, qui se promenait de façon «suspicieuse», il décida d’en avertir la police de Sanford, c’est-à-dire le quartier au sein duquel ces évènements se déroulèrent. Zimmerman prit ensuite l’initiative d’aller confronter le jeune homme, ce qui mena à une altercation violente et se conclut par la mort de Trayvon Martin, atteint d’une balle à la poitrine. Le tireur reporta la situation à la police et fut libéré sans accusations ou amende, lui qui plaida la légitime défense selon la loi «Stand Your Ground» . Le cas gagna de l’attention médiatique de façon exponentielle dans les semaines suivantes, en majorité à cause des enjeux liés au racisme, inévitables dans cette situation. Étant donné que le procès est encore en cours, l’on ne peut que développer une opinion à partir des éléments déjà connus du public, tels que le fait que Zimmerman était bel et bien blessé à la tête et au nez à la suite de l’affrontement. Cependant, d’autres éléments sont encore défendus par la majorité, tels que le fait que Trayvon Martin était de race noire a probablement encouragé le tireur à confronter l’adolescent, ce qui équivaudrait donc à du profilage racial . Un point sur lequel il faut mettre l’accent serait la permissivité qu’offre une loi telle que celle de «Stand Your Ground». Dans une logique parallèle à celle évoquée à propos du Quatrième Amendement, cette loi encourage fortement le profilage racial, étant donné que la légitime défense est prônée si le tireur ressentait une réelle menace. Or, cela n’est plus acceptable, car il s’agit d’un concept plus nocif que bénéfique auprès de la population, tel que le démontre le taux de meurtre qui a quasiment triplé en Floride depuis l’adoption de cette législature en 2005 . Bref, la mort de Trayvon Martin a éveillé la rancune des Afro-Américains qui, malgré l’évolution de leur droits d’un point de vue judiciaire, ressentent encore de nos jours, si ce n’est pas tout autant qu’auparavant, le racisme qui se veut omniprésent dans la société.
Conclusion
En conclusion, le Droit américain a grandement évolué au fil des siècles afin de mieux répondre à la réalité des rapports entre Américains et Afro-Américains, mais l’on ne peut affirmer que tous les moyens sont mis en place afin d’assurer une jurisprudence impartiale. Tel que démontré tout au long de l’article, l’Histoire commune des races blanche et noire aux États-Unis permet de noter une évolution dans les rapports interraciaux, mais ces derniers sont empreints de haine et de ressentiment, ce qui empêche la création d’un Droit réellement équivalent. Ensuite, la pertinence de la Constitution est discutable, étant donné qu’il s’agisse d’un document de loi datant de plusieurs siècles, malgré qu’il ait été actualisé au travers de plusieurs amendements et ce document n’est plus adapté aux besoins juridiques américains pour gérer leurs rapports interraciaux et généraux. De plus, les différents procès décrits démontrent que la justice américaine peut encore être détournée, en particulier à cause de la Constitution et de certaines lois permissives qui encouragent le racisme, directement ou indirectement. Le Droit ne reflète que la mentalité américaine dans ses verdicts et ses lois, c’est donc dire que les Américains permettent encore le racisme, car ils sont indifférents à ses répercussions ou tout simplement peu concernés. L’utilisation du mot Afro-Américain en 2012 connote une ségrégation qui, bien qu’elle représente l’héritage africain, évoque un pays incapable d’intégrer une culture qu’il a forcée sur son territoire.